J’ai pu me rendre à une conférence des Estivales de la question animale à Marlhes (42) et j’en suis ravie.
C’était la première fois que j’y participais et je n’ai pas été déçue, bien au contraire. Les conférences-débats se sont révélées très intéressantes et approfondies. Je tire mon chapeau aux intervenants et aux organisateurs. Tout ça dans une ambiance très sympa. Mon seul regret est de ne pas avoir pu me libérer pour rester plus.
Sur ce lien, vous trouverez la grille du programme des Estivales et vous pourrez cliquer sur les conférences qui vous intéressent pour en voir les vidéo/audio et les comptes-rendus :
http://www.question-animale.org/fra/estivales-2013-programme
Un repas préparé par Las Vegan – grr j’ai pas pu goûter à leurs plats !
La conférence à laquelle j’ai assisté était celle du dimanche 4 août au matin, celle de Melvin Josse : « Sur la politisation du mouvement animaliste, avec l’exemple autrichien et néerlandais »
Pour résumer cette conférence (vous aurez un meilleur compte-rendu sur le site des Estivales), Melvin Josse nous a exposé son étude des cas des Pays-Bas et de l’Autriche par rapport à la France concernant la politisation des revendications pour les droits des animaux. Il en a d’ailleurs fait un livre, que j’aimerais beaucoup lire : Militantisme, politique et droits des animaux.
Melvin Josse souhaite que la question du droits des animaux devienne politique. Le respect de la vie et de l’intégrité physique et morale des autres animaux est une question éthique. On ne parle donc pas de choix personnel ou de goût. Pour élever un débat au niveau politique, il faut se positionner sur le bon plan.
Il n’est plus (seulement) question de discuter avec ses proches (ou moins proches) de notre (non-)légitimité à exploiter et faire souffrir inutilement, ce à quoi on s’entend souvent répondre « Je respecte ton choix si tu respectes mon choix (donc taggle) ». Il est question de choix de société, de réelle évolution morale, tout comme les luttes contre l’esclavage, contre la colonisation et les zoo humains (tiens donc), les droits des femmes et ceux des enfants…
Il s’agit également de donner la possibilité aux gens de vivre autrement. Car actuellement il est difficile d’être vegan pour la simple et bonne raison que la société est inadaptée à cette façon de vivre. Nous sommes dans un système ultra-capitaliste où les seules règles sont la loi du plus fort et la recherche du profit. C’est ainsi que les lobbys industriels empêchent les gens d’accéder aux informations et ne proposent presque que des produits cheap, de mauvaise qualité et non éthiques. Avec une forte influence politique, il deviendrait possible de rétablir la vérité (informations) et l’équilibre (arrêt des subventions pour les produits polluants et carnés). Il serait facile de trouver des produits éthiques et de bonne qualité, et leur prix serait moindre car rien ne serait faussé par l’intervention gouvernementale sur les prix.
Bien sûr, il faudrait commencer par des objectifs plus modestes et atteignables. Mais le débat serait lancé sur la place publique, autant sur le plan philosophique que pragmatique.
Quelques points clés de la conférence sur ce sujet :
— 82% des français sont contre les batteries (pour les poules pondeuses) mais 80% des français consomment des oeufs de poules élevées en batterie => Cette incohérence montre que la sensibilisation a ses limites. Les gens ne pensent pas forcément au sort des animaux lorsqu’ils font leurs achats (loin de là !) et lorsqu’ils y pensent ils ne sont bien sûr pas en train de faire leurs courses. Ne plus vendre d’oeufs de batterie serait largement approuvé et les gens continueraient d’acheter leurs oeufs sans se « prendre la tête », à raison.
— Melvin Josse explique les différences de situations et de stratégies aux Pays-Bas et en Autriche.
En Autriche, les animalistes, auxquels s’opposait fermement le parti le plus à Droite (vote des chasseurs), ont amené les autres partis à prendre position en s’unissant contre la Droite conservatrice, en soutenant les animalistes. Ils ont également misé sur l’omniprésence médiatique, en intervenant et en interrompant des meetings, des interviews. La riposte contre eux a été physique. Résultat : une perte de points aux élections pour la Droite, une augmentation du capital sympathie pour les animalistes. Enfin, une alliance est née entre Martin Balluch et Les Verts, ce qui a pu rendre possible de nombreuses victoires welfaristes et même une mention du Droit des animaux dans la Constitution !
Aux Pays-Bas, un Parti pour les animaux existe depuis 2002. Il se déclare welfariste par stratégie. Il fait appel au soutien de personnalités. Ce parti est entré au Parlement et depuis lors les autres partis sont influencés en faveur des animaux non humains. Le film « Meat the truth » fait par le Parti pour les animaux a été projeté devant les parlementaires pour forcer le gouvernement à réagir. Celui-ci a demandé un rapport. Le rapport à confirmé ce qui était montré dans le film. Résultat : une crédibilisation du Parti pour les animaux, une décrédibilisation du gouvernement, une sensibilisation à la cause animale. Actuellement les partis qui soutiennent le Parti pour les animaux progressent, le rapport de force pourrait donc s’inverser.
–En France, les obstacles principaux sont :
– les gros lobbys (chasse, agriculture, labo pharmaceutiques)
– l’anthropocentrisme historique (l’homme vu au centre de tout, le concept d’animal-machine de Descartes…)
– moins d’unité dans les mouvements animalistes
La situation commence pourtant à changer.
Un parti a plus de visibilité qu’une association, il amène la question sur le terrain politique, il représente une menace pour les autres partis (Les Verts en premier lieu ?)
Pour se présenter aux élections présidentielles, l’obstacle reste le nombre de parrainages à obtenir. Les Européennes offrent plus de possibilités (proportionnelle).
Un Parti animaliste aurait-il ici…
-une influence sur les autres partis
-ou une ambition réelle d’obtenir du pouvoir (sièges au Parlement) ?
Le pays est trop polarisé et la proportionnelle n’existe pas, il ne serait sans doute pas possible d’obtenir des sièges au Parlement. Il faudrait donc se contenter d’influencer les autres partis, ce qui peut déjà apporter beaucoup !
Conclusion :
Il faut comprendre que ce serait un cercle vertueux qui serait mis en place :
La sensibilisation de la population appuie la possibilité de revendications et d’appuis politiques, qui à son tour renforce la sensibilisation de la population sur le sujet.
Il est important de continuer les actions sur le terrain, en complément du lobbyisme politique. Il faut créer un lien avec le monde politique, avoir une structure unie, réactive. Une structure comprenant une association à fort financement (type SPA) et des associations avec des militants très actifs (type L214) serait idéale. Il est nécessaire d’obtenir des succès initiaux pour créer une dynamique vertueuse, et donc de trouver des objectifs communs, à courts termes (donc welfaristes). L’aide de Business Angels pour le financement, de militants étrangers pour étudier les stratégies, d’intervenants d’école de commerce/de communication… serait la bienvenue pour plus d’efficacité. Tout ceci coordonné par une petite équipe mobile et dynamique.
Voici une petite interview de Melvin Josse à l’occasion des Estivales :
Et je me permet d’ajouter un lien vers un strip BD d’Insolente Veggie qui explique très bien l’importance de la politisation de cette question.
[…] déjà assisté à l’édition 2013 (mon compte-rendu ici) et j’avais été enthousiasmée par la qualité des conférences, et j’avais regretté […]
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